1. Pourquoi ce projet de loi ?
La loi d'orientation et de programmation de la Justice, présentée par le Garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, en conseil des ministres le 3 mai 2023, est issue des travaux des États généraux de la Justice menés par monsieur Jean-Marc Sauvé de l'automne 2021 au printemps 2022.
Dans son rapport remis le 8 juillet 2022 au Président de la République, le comité des États généraux de la Justice, intitulé "Rendre justice aux citoyens", pointe "un état de délabrement avancé" de l'institution judiciaire, après des "décennies de politiques publiques défaillantes". Notre système judiciaire est en crise, ce qu'illustrent les délais de jugements excessifs, les conditions de travail compliquées, une exécution tardive des décisions, les infrastructures anciennes, une numérisation absente, les conditions de détentions indignes.
La crise est double : le personnel du système judiciaire se sent peu valorisé et découragé tandis que les citoyens perdent confiance en l'institution.
Pour y remédier, le Garde des Sceaux a présenté un projet de loi doté d'un budget inédit pour la période 2023-2027 afin de répondre à deux objectifs :
- Rendre la justice plus rapide ;
- Rendre la justice plus compréhensible.
2. Quelles sont les mesures proposées par le Gouvernement ?
L'objectif du gouvernement est de répondre aux défaillances du système judiciaire français. Pour pallier aux manquements actuels mis en avant par les Etats Généraux de la Justice, le texte de loi prévoit des mesures sur différents aspects :
Les citoyens critiquent la lenteur du système judiciaire. Pour cela, le texte de loi tend à réduire les délais de traitements des affaires, tant civiles que pénales. À titre d'illustration, en matière pénale, le délai moyen de traitement des affaires est de 13 mois depuis 2022. Avec ce texte de loi, les objectifs sont d'atteindre une moyenne de 10,4 mois fin 2023, puis 8,5 mois fin 2027.
Les citoyens et le personnel judiciaire pointent aussi du doigt l'illisibilité du code de procédure pénale. En raison d'une forte inflation législative depuis 1958, il est passé de 800 articles à plus de 2400 articles. Pour répondre au manque de lisibilité du code, le gouvernement prévoit de demander au Parlement d'être habilité à simplifier le code de procédure pénale à droit constant par voie d'ordonnance. Une série de mesures prévoit également de perfectionner le déroulement de la procédure pénale en améliorant les règles concernant l'enquête, l'instruction, le jugement et l'exécution des peines. L'extension de la possibilité de recourir aux perquisitions de nuit en cas d'enquête de flagrance, la mise en place de la télécommunication médicale au moment du renouvellement de la garde à vue et l'unification des délais de jugement en matière de détention provisoire, font partie des mesures proposées par le texte qui permettront d'améliorer la procédure pénale.
Au-delà de la justice pénale, le texte souhaite aussi rendre plus performante la justice civile et commerciale, particulièrement sollicitée aujourd'hui. Pour cela, une expérimentation est proposée pour moderniser la justice commerciale. Elle consiste à élargir les compétences des tribunaux de commerce à l'ensemble des procédures amiables et collectives pour une durée de 4 ans et à mettre en place une contribution financière pour la justice économique.
Le projet de loi accorde également une attention particulière à la politique carcérale. Les peines alternatives, la construction de nouvelles places de prison, le renforcement des moyens de l'administration pénitentiaire, l'autorisation de caméras individuelles, la création de surveillants adjoints et d'une réserve pénitentiaire sont autant de mesures proposées pour faciliter et valoriser le travail du personnel pénitentiaire.
Toutes ces mesures visent à dynamiser, moderniser et simplifier notre système judiciaire pour que les citoyens retrouvent confiance en leur institution et que le personnel judiciaire soit valorisé. Ce texte de loi est accompagné d'un rapport annexé qui explique en détail le plan d'action du Ministère de la Justice pour les années à venir.
Durant deux semaines avec mes collègues rapporteurs, Jean Terlier, Philippe Pradal et Didier Paris, nous avons auditionné de nombreux représentants des acteurs du système judiciaire afin de recueillir leur avis et leur recommandations concernant le projet de loi qui leur ait proposé. Ces longs échanges ont permis d'affiner le texte pour qu'ils correspondent aux attentes et aux besoins ressentis sur le terrain. C'est cette version du texte que nous défendons devant la commission des lois, puis en séance publique avec l'ensemble des mes collègues députés.
Retrouvez le rapport réalisé avec mes collègues rapporteurs suite aux auditions menées :
3. Où en est-on ?
Le texte de loi qui fait l'objet d'une procédure accélérée a été adopté par les sénateurs le 13 juin 2023. La commission des Lois examine le projet de loi la semaine du 21 juin pour un examen en séance publique à partir du 3 juillet 2023. En commission des Lois, le texte a également été adopté par les députés membres de la commission en y apportant quelques modifications par voie d'amendements.
L'Assemblée nationale a adopté le texte le 18 juillet 2023 avec une 388 voix pour. La commission mixte paritaire aura lieu en octobre 2023.