1. Pourquoi cette proposition de loi ?
Depuis une dizaine d'année, entre 20 000 et 30 000 hectares sont artificialisés chaque année en France au détriment de surfaces agricoles. Limiter le bétonnage du territoire a fait l'objet de nombreuses réflexions durant la convention citoyenne pour le Climat qui a proposé la mise en place d'un double objectif parmi ses propositions :
- Réduire de moitié, d'ici 2031, le rythme d'artificialisation des sols français par rapport à celui observé lors des dix dernières années (2011-2021);
- Atteindre un rythme de zéro artificialisation nette d'ici 2050.
Freiner l'artificialisation des sols est un acte majeur dans la lutte contre le dérèglement climatique et l'érosion de la biodiversité. La Loi Climat et Résilience du 22 août 2021 issue de la convention citoyenne pour le Climat, impose ainsi aux collectivités territoriales de respecter ce double objectif à horizon 2031 et 2050.
Néanmoins, de nombreux élus se sont levés contre cette nouvelle mesure relevant des inadéquations dans les dispositifs instaurés et des objectifs trop ambitieux pour les communes. L'association des maires de France a déposé deux recours devant le Conseil d'État, critiquant la précipitation de la mesure, l'absence d'étude d'impact et les conséquences, telles que l'augmentation des fractures territoriales et la fragilisation juridique des documents de planification.
De fait, la proposition de loi vise à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de "zéro artificialisation nette" (ZAN) en assouplissant le rythme des mesures imposées pour réduire l'artificialisation des sols.
Dans le cadre du ZAN, les régions se voient confier la tâche de "territorialiser" l'objectif d'une diminution de 50%, c'est-à-dire de répartir et d'adapter l'effort de réduction entre les différentes zones de leur périmètre régional, par modification de leurs documents de planification d'ici février 2024, selon la hiérarchie des normes en matière d'urbanisme.
Or, les élus locaux craignent une répartition territoriale injuste des droits à artificialiser ainsi qu'une réduction drastique de la consommation d'espaces, nuisible au développement communal. Ils remettent également en question l'absence de responsabilité partagée entre l'État et les collectivités, qui se retrouvent seules à devoir supporter la charge de ce projet.
L'objectif de cette proposition de loi est d'assouplir plusieurs dispositions, prendre en compte les spécificités territoriales, assurer un partage de l'effort de réduction et permettre aux territoires de développer des projets cruciaux pour leur développement.
2. Que contient la proposition ?
Le texte de loi propose plusieurs pistes d'assouplissement des conditions de mise en oeuvre de l'objectif ZAN.
Il permet, avec l'article 1, d'accorder un délai d'un an supplémentaire aux collectivités pour accorder leurs documents de planification et d'urbanisme aux objectifs ZAN.
L'article 2 restaure un principe de prise en compte en remplacement d'un principe de compatibilité entre les documents régionaux et les documents d'urbanisme locaux. Dans les faits, le rapport entre les dispositions ZAN du SRADDET (documents d'aménagements stratégiques portant sur les politiques d'aménagement engagées sur le territoire régional) et les autres documents de planification serait un rapport de prise en compte, étend entendu que les dispositions des autres documents de planification ne devront pas être ignorés ou s'éloigner des dispositions du SRADDET, alors que le rapport de comptabilité, impose une interdiction de contradiction entre les documents. Cet article limite la portée du SRADDET.
L'article 3 remplace les conférences des SCoT par une conférence régionale de gouvernance du ZAN.
L'article 4 vise à exempter de la comptabilité du taux d'artificialisation des sols certains "grands projets" à l'échelle nationale afin que les régions accueillantes ne soit pas pénalisées. La loi prévoit la liste des catégories de projets qualifiés de "grands projets nationaux", ainsi que les mécanismes pour les identifier.
L'article 5 vise à prendre en compte les projets d'envergure régionale, en précisant les conditions de mutualisation pour permettre aux communes, aux EPCI compétents, aux départements ainsi qu'à leurs groupements d'être force de propositions pour l'identification de ces projets. Pour l'article 6, l'objectif est de renforcer la prise en compte des efforts passés de sobriété foncière avant 2031.
L'article 7 garantit pour chaque commune que la mise en oeuvre du ZAN ne se traduira pas par une absence totale de droits à construire. Ainsi, cet article garantit une surface de un hectare comme surface minimale de développement communal.
Pour l'article 8, l'objectif est de définir une part réservé au développement territorial afin de prendre en compte les projets pour les territoires ruraux qui ne pourraient être réalisés parce qu'ils dépasseraient les objectifs ZAN.
L'article 9, définit le caractère artificialisé des surfaces tandis que l'article 10 vise à prendre en compte les spécificités des communes littorales concernées par le recul du trait de côte. Il prévoit de compter les parcelles rendues inutilisables en raison de l'érosion côtière de l'artificialisation constatée sur le périmètre de la commune et de les considérer comme renaturation.
Pour finir, les articles 11 à 14 prévoient les outils nécessaires pour faciliter la transition vers le "ZAN".
Ainsi, les objectifs de la proposition de loi sont multiples :
- Améliorer la gouvernance et la prise de décision entre les échelons territoriaux ;
- Prendre en compte les spécificités territoriales ;
- Favoriser les outils de transition vers le ZAN.
3. Où en est-on ?
Le texte de loi a été examiné et adopté en séance publique au Sénat le 16 mars 2023 et est examiné à l'Assemblée nationale la semaine du 18 Juin 2023. L'Assemblée nationale a adopté le texte mardi 27 juin 2023. et le vote solennel a lieu le mardi 27 juin 2023.