Carnet de Bord

PJL Immigration - La décision du Conseil Constitutionnel

Le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision concernant le projet de loi visant à contrôler l'immigration et améliorer l'intégration en censurant 34 articles sur les 89 du texte, ainsi qu'en exprimant des réserves sur 2 articles.  La censure des 34 articles est justifiée par les Sages au regard du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution qui énonce que "Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l'adoption d'un texte identique. Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis." En effet, chaque amendement déposé doit pouvoir avoir un lien direct ou indirect avec l'article du texte auquel il se rattache. À défaut, il sera jugé irrecevable, car considéré comme un cavalier législatif. 

Ainsi, le Conseil constitutionnel a jugé que 34 articles issus de la version du projet de loi votée après la commission mixte paritaire, n'ont pas de lien direct ou indirect avec les articles du projet de loi présenté initialement. En cela, le Conseil Constitutionnel a censuré au regard de la procédure législative et non sur la constitutionnalité des dispositions ou sur leur pertinence. Les articles censurés sont les suivants : 

  •   Les articles 3, 4 et 5 relatifs au durcissement des conditions permettant à un étranger en situation régulière, d’être rejoint, au titre du regroupement familial, par des membres de sa famille, tels que l'apprentissage du français, un niveau de ressources minimum et la justification d'une assurance maladie ;  
  • Les articles 6 et 8 relatifs à l'allongement et au durcissement des conditions nécessaire à l'obtention d'un titre de séjour pour motif familial ;  
  • Les articles 9 et 10 modifiant les conditions de délivrance d’un titre de séjour étranger malade en imposant la condition selon laquelle le demandeur devait justifier de l'absence d'un traitement existant dans son pays d'origine ;
  • Les articles 11, 12 et 13  relatifs à la mise d'une caution minimum pour l'obtention d'un titre de séjour pour les étudiants et à l'augmentation des frais d’inscription pour les étudiants étrangers dans certains établissements d’enseignement supérieur ;  
  •  L’article 15 relatif à l'obligation pour les étrangers en situation irrégulière de justifier d'un niveau de recours nécessaire pour bénéficier des réductions tarifaires sur les titres de transports en Ile-de-France ;  
  • L’article 16 relatif à l'autorisation pour les ressortissants britanniques d'obtenir un titre de séjour long lorsqu'ils justifient d'une résidence secondaire en France ;  
  • L’article 17 sanctionnant d’une peine d’amende délictuelle le séjour irrégulier d’un étranger majeur ;  
  • L’article 18 aggravant les sanctions applicables aux reconnaissances frauduleuses de paternité ; 
  •  L’article 19 relatif au durcissement des conditions d'accès à certaines aides sociales pour les étrangers en situation régulière ;  
  • L’article 22 prévoyant que les actes et décisions de justice étrangers relatifs à l’état civil, produits par un ressortissant étranger pour justifier de son identité, doivent être préalablement légalisés ;  
  • Les articles 24, 25 et 26 réformant certaines règles du code civil relatives au droit de la nationalité ; 
  •  L’article 32 prévoyant qu’en cas de suspicion de mariage frauduleux signalée par l’officier d’état civil, le silence gardé pendant 15 jours par le procureur de la République entraine par défaut, et pour 2 mois renouvelables, le sursis à la célébration du mariage ; 
  • L’article 33 prévoyant que la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » au jeune majeur ayant été confié au service de l’aide sociale à l’enfance au plus tard le jour de ses seize ans est désormais subordonnée à l’absence avérée de liens avec sa famille restée dans son pays d’origine ;  
  • L’article 45 prévoyant que l’évaluation de la situation d’une personne se déclarant mineure et privée temporairement ou définitivement de la protection familiale est réalisée sur la base d’un cahier des charges national défini en concertation avec les départements ;  
  • Les dispositions de l’article 47 prévoyant que l’aide internationale au développement doit prendre en compte le degré de coopération des Etats en matière de lutte contre l’immigration irrégulière ;  
  • L’article 48  relatif à l’information des organismes de sécurité sociale et à Pôle emploi des décisions d’OQTF et de l’obligation de radiation une fois la décision devenue définitive ;  
  • L’article 50  relatif à l’unicité de l’aide au retour ;  
  • L’article 58  supprimant le délai d’un jour franc que l’étranger faisant l’objet d’une OQTF pouvait demander avant son rapatriement ; 
  •  La disposition de l’article 64 prévoyant que la décision définitive de rejet d’une demande d’asile prononcée par l’OFPRA entraine immédiatement l’interruption de la prise en charge des frais de santé de l’étranger ;  
  • L’article 65  relatif au resserrement des critères de réunification familiale et à la suppression de la possibilité de réunification familiale pour les frères et soeurs du réfugié ;  
  • L’article 67 modifiant les conditions d’hébergement d’urgence de certaines catégories de personnes sans abri ou en détresse ;
  • L’article 68  intégrant les places destinées à l’accueil des demandeurs d’asile dans le décompte du taux de 20 à 25% de logements sociaux imposés aux communes depuis la loi SRU ;  
  • L’article 69 interdisant le maintien, sauf décision explicite de l’administration, des personnes déboutées du droit d’asile dans un hébergement d’urgence ;  
  • L’article 81 modifiant les conditions d’acquisition de la nationalité française pour les mineurs nés de parents étrangers dans certains territoires ultramarins.


Deux articles en revanche ont été censurés sur le fond : 

  • L'article 1er qui imposait au Parlement la tenue d'un débat annuel sur la politique d'immigration. Le Conseil Constitutionnel a jugé qu'aucun article de la la Constitution ne permettait aux législateurs d'imposer un débat ou la tenue de certains objectifs chiffrés. En revanche, il est possible de demander la remise d'un rapport annuel. 
  • L'article 38 relatif à la prise d'empreinte et de photographie sans consentement. Le Conseil Constitutionnel a jugé que cet article n'assurait pas assez de garanties, car ces procédures ne seraient pas validées par le Procureur et qu'aucune garantie qu'il s'agit de l'unique moyen d'identification n'est à démontrer.