Carnet de Bord
Mon intervention sur la PPL visant à protéger les victimes de violences intrafamiliales
Lors de la niche parlementaire du groupe socialistes et apparentés, le 9 février 2023, j'ai défendu la position du groupe Démocrate en séance publique lors de l'examen de la PPL visant à octroyer une protection renforcée aux enfants en cas de violences au sein de la famille.
Estimant que les réformes initiées en 2019 et 2020 restaient insuffisantes, la rapporteure de ce texte, madame Isabelle SANTIAGO, a souhaité proposer deux champs d'action qui ont été améliorés par plusieurs amendements, fruits d'un travail trans partisan auquel le groupe démocrate a participé. La proposition de loi adoptée le jeudi 9 février à l'unanimité par les députés présents propose ainsi :
- L'extension de la suspension provisoire de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement au stade des poursuites dans les cas les plus graves, notamment en cas de crimes (et non seulement de viols) ou agression sexuelle incestueuse commis contre son enfant ;
- L'automaticité du retrait de l'autorité parentale ou de l'exercice de l'autorité parentale en cas de condamnation pour crime ou agression sexuelle contre l'enfant ou en cas de crime contre l'autre parent, sauf si le juge, par décision contraire spécialement motivée, considère que ce n'est pas nécessaire.
"Monsieur le Président,
Monsieur le Garde des Sceaux,
Madame la Rapporteure,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Mes Chers Collègues,
Un milliard… Un milliard c’est le nombre d’enfants âgés entre 2 et 17 ans ayant subis des violences physiques, sexuelles, émotionnelles ou des négligences au cours de l’année qui vient de s’écouler.
Et la France ne fait pas exception, nous le constatons tous les jours. De trop nombreux enfants sont encore les victimes directes ou indirectes des agissements d’un parent violent. En 2019, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes recensait 400 000 enfants vivant dans un climat de violences intrafamiliales. En 2021, plus de 50 000 enfants et adolescents ont été victimes de maltraitance et 14 enfants mineurs sont décédés, tués par un de leurs parents dans un contexte de violence au sein du couple. En 2022, selon le dernier rapport d’UNICEF, un enfant est tué par l’un de ses parents tous les cinq jours en moyenne en France.
Le constat est sans appel : les années se suivent et se ressemblent. Les violences intrafamiliales sont en constantes augmentation. Or, victimes ou co-victimes, quand une dynamique de violence conjugale est présente dans une famille, les enfants sont directement affectés par la situation.
Il est du devoir de la représentation nationale de donner à la loi les moyens de sanctionner ces actes à la hauteur de leur gravité mais aussi de prévenir leur réitération afin de mieux protéger les enfants et de les extraire de cet environnement nocif. Pour leur bien-être, il peut s’avérer nécessaire de couper, en tout ou partie, les liens avec le ou les parents auteurs de violences. C’est ce qui leur permettra de grandir dans un environnement sain et épanouissant. C’est ce que qui leur permettra de devenir les adultes de demain.
Le groupe Démocrate salue donc à ce titre la volonté qui est la vôtre, Madame la Rapporteure, de donner un nouveau cadre à l’autorité parentale et à l’exercice de l’autorité parentale. Pour autant, les législateurs que nous sommes ne peuvent faire l’économie des principes fondamentaux de notre droit. C’est pourquoi, le groupe Démocrate s’était montré réservé quant au caractère automatique d’un retrait de l’autorité parental tel qu’il avait pu être proposé en première lecture en commission. Selon nous, il allait à l’encontre du principe d’individualisation des peines protégé par l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et du citoyen. Le travail transpartisan qui a pu être mené nous permet d’arriver aujourd’hui devant cette assemblée avec un texte équilibré. Je tiens à ce titre à vous remercier Madame la Rapporteure, de nous avoir permis ces échanges. Cette ligne de crête est selon nous le juste équilibre entre protection de l’enfant et préservation des relations familiales ainsi que des liens d’attachement.
Désormais, l’autorité parentale et les droits de visite et d’hébergement seront suspendus de plein droit dès le déclenchement des poursuites par le ministère public dans les cas les plus graves et notamment en cas d’agression sexuelle incestueuse ou crime commis par un parent sur son enfant.
Désormais, l’autorité parentale et les droits de visite et d’hébergement seront aussi suspendus de plein droit lorsqu’un parent sera condamné, même non définitivement, pour violences sur l’autre parent. A ce titre, le groupe Démocrate porte un amendement afin de préciser qu’il ne s’agit bien que de violences volontaires. Les violences involontaires ne préjugeant en rien de la capacité du parent à exercer correctement son autorité parentale.
Désormais, la condamnation d’un parent pour crime ou agression sexuelle incestueuse commis sur son enfant ou pour crime commis sur la personne de l’autre parent entrainera un retrait de l’autorité parentale ou de l’exercice de l’autorité parentale, sauf décision contraire spécialement motivée. Le juge pourra donc statuer in concreto et devra motiver sa décision de maintenir un lien entre le parent condamné et l’enfant. Cette appréciation des faits par le juge est primordiale pour assurer la meilleure justice qui soit.
Reprenant les mots de la Déclaration des droits de l’enfant de 1959, je vous dirai pour conclure que « l’intérêt supérieur de l’enfant doit être (notre) guide ». Il doit être la considération déterminante de nos réflexions et de nos choix.
C’est pourquoi, chers collègues, nous devons voter pour ce texte. Soyez assurée, Madame la Rapporteure, que si cet équilibre est maintenu, le groupe Démocrate votera en faveur de ce texte avec enthousiasme ! Je vous remercie."