La commission spéciale a officiellement commencé son travail d'examen du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique, mardi 19 septembre 2023, par l'audition du ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications, Jean-Noël BARROT. Chargé de porter le texte au nom du gouvernement, le ministre a présenté et défendu son projet de loi rappelant l'urgence à légiférer sur le sujet de la protection des mineurs en ligne et de transposer les règlements européens en droit français. Ce texte est ambitieux et regroupe une large palette de mesures visant à renforcer la souveraineté numérique française ou encore à lutter contre les fraudes et les arnaques.
J'ai porté la voix du groupe Démocrate lors de cette audition pour exposer notre point de vue et notre volonté de voter en faveur de ce texte :
"Monsieur le Ministre, Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Rapporteurs,
Mes chers collègues
Lundi, pour la première fois en France, des parents ont porté plainte contre TikTok pour « provocation au suicide », « non-assistance à personne en péril » et « propagande ou publicité des moyens de se donner la mort ». Selon eux, le réseau social « a sa part de responsabilité » dans le suicide de leur fille le 16 septembre 2021.
S’il est incontestable que nous, adultes et pour beaucoup parents, devons apprendre à nos enfants à utiliser les réseaux sociaux en bonne intelligence, nous ne pouvons pas tout. L’Etat non plus. Notre rôle dans cette commission et face à ce projet de loi est certes de doter l’Etat des outils suffisants pour lutter contre les violences en ligne, mais il est avant tout de rappeler la responsabilité de chacun, au premier rang de laquelle celle des plateformes. Elles doivent maitriser les risques relatifs aux usages d’internet.
S’il fallait s’en convaincre davantage je vous rappellerais les dizaines de milliers de messages d’insultes sexistes et sexuels reçus par l’influenceuse Manon Lanza après son accident au Grand Prix de Formule 4 le week-end dernier.
Il est urgent d’assainir cet écosystème.
Pour cela, nous devons définir des interdits clairs et précis. La délictualisation de l’outrage sexiste et sexuel lorsqu’il est commis en ligne en est la première étape. Si cette infraction a tout d’abord été pensée pour lutter contre le harcèlement de rue dans l’espace public, elle doit être étendue au harcèlement dans l’espace public numérique. Le recours à l’amende forfaitaire délictuelle permettra alors de réprimer plus efficacement et plus rapidement les cyberoutrages. Toutefois, l’AFD ne peut être la réponse à tous ces cyberoutrages. Nous devons nous garder de créer un délit d’outrage puni d’une telle amende qui risquerait d’englober des infractions plus graves, plus sévèrement réprimées et pour lesquelles il est nécessaire de laisser le temps à la justice de faire son travail.
Nos débats nous mènerons aussi à questionner la place de l’anonymat dans l’espace numérique. Dans le prisme de la lutte contre la haine en ligne, c’est une question qui doit être posée. Je sais que c’est votre volonté monsieur le rapporteur général. Pour autant, nous ne pourrons pas soutenir les initiatives qui iront plus loin car nous touchons ici à l’un des fondements d’internet. Un tel changement doit être envisagé avec beaucoup de précaution et un travail de longue haleine, de préférence à l’échelon européen.
En tout état de cause, le groupe Démocrate votera ce texte, indispensable pour sécuriser et réguler notre espace numérique et assurer la souveraineté de la France en la matière.
Je vous remercie."